Slap !

 








             Un bourreau A et le condamné B










 

A : Placez vos genoux ici, posez votre tête là.

 

B : On m’avait dit que j’aurais la chaise électrique.

 

A : Ah bon ? Bah trop tard. De toute façon, c’est mieux la guillotine.

 

B : Comment vous le savez ? Vous l’avez déjà testée ?

 

A : Non, il parait, c’est tout.

 

B : Les morts sont revenus pour vous faire une critique constructive des moyens de mise à mort ?

 

A : Oh mais arrêtez de parler, vous me stressez !

 

B : Je ne sais pas qui de nous deux est censé être le plus stressé…

 

A : Mais vous comprenez, c’est la première fois que je décapite quelqu’un.

 

B : Moi c’est la première fois que l’on me décapite, figurez-vous.

 

A : Vous êtes gentil de me le dire, je suis tout de suite moins intimidé.

 

B : Je n’ai quand même pas de bol d’avoir hérité d’un bourreau si débile.

 

A : Pardon ?

 

B : Non, rien… Bon, c’est quand vous voulez hein, mais je n’ai pas que ça à faire, moi !

 

A : Ah si justement, vous n’avez plus que ça à faire.

 

B : … Très juste, en effet.

 

A : Mais enfin, comment actionne-t-on ce machin ?!

 

B : Je ne mérite pas d’être tué de toute façon, alors laissez tomber.

 

A : Mais je vous dis que je ne sais pas comment le laisser tomber ! Allez, dites-moi comment ça fonctionne.

 

B : Oh, ce serait la meilleure ! Et puis quoi encore !?

 

A : Ah rien rien, promis je ne vous embêterai plus jamais, après !

 

B : Vous êtes drôle. Bon, d’accord. Venez deux secondes à ma place, le temps que je vous fasse une démonstration, puis on rééchange les rôles, d’accord ?

 

A : Ah d’accord, vous êtes trop aimable… Ah non non non en fait, je ne vais pas à votre place ! Vous êtes un petit malin, vous !

 

B : J’y étais presque.

 

A : Bon, à la guerre comme à la guerre, j’appelle ma mère.

 

B : Mettez le haut parleur !

 

A : Allô maman ? Maaamaaan, je ne sais pas comment on fait avec la guillotine !!

 

M : Calme-toi mon trésor. Où es-tu ?

 

A : Je suis avec le condamné et je ne comprends rien, je vais me faire virer !

 

M : Allons allons. Tu vois une manivelle sur le côté ?

 

A : Ça ?

 

M : Je ne sais pas, je ne te vois pas.

 

B : Mais oui, ça, abruti !

 

A : Tais toi, toi ! Oui maman, je la vois.

 

M : Bon, et bien je crois que tu dois juste l’abaisser.

 

A : Vers le bas ?

 

M : Oui, c’est exact mon trésor. Rien de plus facile, tu verras, tu n’auras même pas mal au bras.

 

B : Dieu soit loué, il n’aura pas mal au bras !

 

A : Bon, je te laisse, merci maman.

 

M : Et n’oublie surtout pas de bien te laver les mains après, surtout si tu dois déplacer la tête ! Et ne joue surtout pas avec, hein ? Même si tu en as envie.

 

A : Oui oui. A tout à l'heure.

 

B : Vous comptiez jouer avec ma tête ?

 

A : Mais non ! Bon vous êtes prêt ? J’actionne…

 

B : Non non, attendez ! Vous devez me demander si je n’ai pas une dernière volonté, pas vrai ?

 

A : Ah oui… Avez-vous une dernière volonté ?

 

B : Oui. J’aimerais que vous disiez à ma femme qu’elle a perdu son pari.

 

A : Vous savez, elle va vite l’apprendre de toute façon, qu’elle a perdu son mari… Sans vouloir vous offenser.

 

B : Son pari, pas son mari ! Elle avait parié que j’aurais les chocottes avant de me faire tuer, eh ben même pas peur !

 

A : C’est bien, ça. Vraiment, vous êtes admirable… Enfin, je ne suis pas très au courant de vos crimes, au fait… Qu’avez-vous commis pour être ici ?

 

B : Ça ne vous regarde pas !

 

A : Oh c’est bon, vous êtes à la une de tous les journaux de toute façon.

 

B : Eh bien, si vous lisiez les journaux…

 

A : Je ne sais pas lire… Mais je peux dire que vous aviez l’air bien plus méchant sur la photo qu’en vrai. Vous avez une belle petite frimousse !

 

B : Profitez-en bien, elle ne gardera pas encore très longtemps cette belle allure.

 

A : Je pourrais l’empailler…

 

B : N’y pensez même pas !

 

A : Oh si ! Je vous imagine tellement bien sur le mur de mon salon à côté de la tête du sanglier !

 

B : Jamais de la vie !

 

A : De la mort alors ?

 

B : Non plus !

 

A : Bon, très bien. Si vous ne voulez pas qu’on vous admire tous les jours, c’est votre problème.

 

B : Bref. Vous direz donc à ma femme qu’elle me doit 50 euros.

 

A : D’accord, mais comment je vous fais parvenir l’argent ?

 

B : … Ah oui, juste. Et bien, donnez-moi l’argent maintenant. Et puis elle vous remboursera, ça marche ?

 

A : Ah non, je ne vous prête pas mon argent. Si ça tombe, elle va refuser, et après c’est moi qui me fait pigeonner, comme toujours !

 

B : Allez, vous n’êtes pas sympa quoi !

 

A : Bon c’est d’accord. Tenez. De toute façon je pourrai venir le récupérer dans votre poche dès que vous serez mort…

 

B : Ah non, vous n’allez tout de même pas venir me voler !

 

A : Mais enfin, c’est rien, vous ne saurez plus rien faire de cet argent de toute façon.

 

B : Oui bah ça va, pas besoin de me le rappeler. Et puis vous savez, je voulais tellement m’acheter cette montre en réduction… 50 au lieu de 150, c’était l’affaire du siècle !

 

A : Je peux l’acheter à votre place, si vous voulez. Et je la porterai en votre honneur.

 

B : Génial…

 

A : Je l’achèterai avec votre billet, bien entendu !

 

B : Vous me dégoutez. Vous allez pouvoir profiter de MA montre, avec MON billet ! C’est révoltant !

 

A : Oh mais monsieur le condamné, je fais ça seulement pour vous, hein. Moi, j’en ai déjà une de montre, au fond. Regardez.

 

B : Oh… Je pourrais l’avoir ? Comme ça, on est quitte.

 

A : Euh… Allez d’accord, tenez.

 

B : Ah mais vous allez venir la récupérer après, j’en suis sûr !

 

A : Non non, je vous assure. Je le jure même sur votre tête !

 

B : Vous êtes sérieux ?

 

A : Ah, non, pas sur votre tête du coup… Oui, mince. Sur la mienne alors.

 

B : Vous n’avez pas envie de venir me reprendre votre montre avant de me tuer, du coup ?

 

A : … Non, vous ne m’aurez pas deux fois. Bref, assez bavardé.

 

B : Mais je ne voulais pas mourir si jeune !

 

A : Dites-vous que vous seriez mort beaucoup plus jeune si nous n’avions pas autant traîné.

 

B : C’est vrai ça, merci. Merci pour votre incompétence.

 

A : Mais de rien. D’ailleurs, il faut tirer vers le bas ou vers le haut déjà ? C’est quand même compliqué de…

 

SLAP

 

A : Oups… Oh… Mince… Bah, que ça lui serve de leçon à celui-là : quand on me prend la tête, on perd la sienne. Oh, bien trouvé. Maman sera fière de moi.


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